La naissance douloureuse de la RTC

Contexte du litige

  • DIT, filiale des groupes Bolloré et APM Terminals, gérait le terminal à conteneurs du port de Douala-Bonabéri de 2005 à 2019. 

  • En 2018, le PAD lance un appel d’offres international pour renouveler la concession. DIT est exclu dès le premier tour, ce qu’il conteste. 

  • Le PAD décide de reprendre la gestion directe du terminal via la création de la RTC, entité publique autonome, officialisée le 6 décembre 2019. 

 

Création et performances de la RTC

La RTC entre en service le 1er janvier 2020, dès la fin de la concession de DIT. 
Malgré un contexte difficile caractérisé par des crocs-en-jambe, des blocages provoquant une gestion manuelle du terminal, elle a, dès la première année, dépassé les performances de DIT de 2019 (Chiffre d'affaires de 49,9 milliards de Fcfa contre 48,5 pour DIT  et Redevance au PAD de 15 milliards contre 4,6 pour DIT)


Bataille judiciaire

Devant les juridictions camerounaises 

Le Tribunal administratif du Littoral suspend la création de la RTC et annule la procédure d’attribution du terminal à un nouveau concessionnaire. 

La Cour suprême confirme ces suspensions, bloquant temporairement le processus de transition vers la RTC. 

Devant les juridictions internationales 

DIT saisit le Tribunal arbitral de la CCI à Paris, qui condamne le PAD en novembre 2020 à verser 58,6 millions d’euros pour « perte de chance » dans l’appel d’offres. 

Le PAD fait appel. En janvier 2023, la Cour d’appel de Paris annule cette sentence pour irrégularité de composition du tribunal arbitral. 

En juin 2024, la Cour de cassation française rejette définitivement le pourvoi de DIT, confirmant la victoire du PAD4. 

Devant la CCJA (OHADA) 

En novembre 2023, la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) d’Abidjan confirme la légalité de la création de la RTC, désavouant les décisions du Tribunal administratif du Littoral.  

Enjeux et portée 

L’affaire a mobilisé 11 procédures judiciaires et mis en lumière les tensions entre souveraineté nationale et intérêts privés. 

Elle marque une reprise en main stratégique du terminal à conteneurs par le PAD, avec un impact positif sur l’économie locale. 

Le PAD se félicite de voir les revenus du terminal rester dans le circuit économique national, conformément à la vision du Chef de l’État.

Quel sort pour TIL, vainqueur de l’appel d’offres de 2018?

TIL, filiale du groupe MSC (Mediterranean Shipping Company), a remporté l’appel international à manifestation d’intérêt lancé par le PAD en janvier 2018. 

À l’issue de l’évaluation, TIL a obtenu la note maximale de 100/100, se classant 1er sur 9 candidats. 

Le groupement APMT/Bolloré, opérateur sortant via DIT, a été classé 7e, donc non retenu pour la phase finale3. 

Contestation et annulation 

DIT a contesté son exclusion, dénonçant des irrégularités dans le processus de sélection, notamment l’absence de transparence et de phase ouverte. 

En décembre 2019, le Tribunal administratif du Littoral annule la procédure d’attribution en faveur de TIL. 

La Cour suprême du Cameroun confirme cette annulation, bloquant la concession à TIL. 

Conséquences pour TIL 

Malgré sa victoire dans l’appel d’offres, TIL n’a jamais pris possession du terminal, en raison des suspensions judiciaires et de la création de la RTC par le PAD. 

Le PAD a préféré une gestion directe via la RTC, qui a été légalisée par la CCJA en 2023, désavouant les décisions locales. 

TIL reste donc concessionnaire désigné mais non opérationnel, en attente d’un éventuel retour à la table des négociations. 

Perspectives 

La concession de la RTC devait être provisoire (1 an renouvelable), mais elle a été prolongée jusqu’en 2024. 

Les chances de TIL de reprendre les commandes du terminal sont désormais quasi nulles. 

En effet, le PAD a définitivement privilégié une gestion souveraine et nationale. Deux faits l'attestent : 

  1. De régie, la RTC est devenue une filiale à 100% du PAD en 2022 
  2. Le PAD a lancé, en 2025, le chantier de construction de l'immeuble siège de la RTC.

Frise chronologique de l’affaire PAD – DIT – TIL

Date Événement Acteurs Juridiction / Instance Résultat / Impact
2005 Début de la concession du terminal à conteneurs DIT (APMT/Bolloré) PAD DIT devient opérateur du terminal
Janv. 2018 Lancement de l’appel d’offres international PAD, DIT, TIL, 9 candidats PAD TIL obtient la meilleure note (100/100), DIT est classé 7e
Déc. 2019 Création de la Régie du Terminal à Conteneurs (RTC) PAD PAD Fin de la concession DIT, RTC prend le relais
Déc. 2019 Annulation de l’appel d’offres et suspension de la RTC DIT Tribunal administratif du Littoral Procédure d’attribution à TIL annulée, RTC suspendue
Janv. 2020 Entrée en service effective de la RTC PAD, RTC RTC commence à gérer le terminal
Nov. 2020 Condamnation du PAD à verser 58,6 M€ à DIT DIT, PAD Tribunal arbitral CCI (Paris) PAD reconnu coupable de perte de chance
Janv. 2021 PAD fait appel de la sentence arbitrale PAD Cour d’appel de Paris Procédure en cours
Juin 2021 TIL demande à prendre possession du terminal TIL Tribunal administratif du Littoral Demande rejetée comme irrecevable
Nov. 2022 Cour d’appel de Paris annule la sentence arbitrale PAD, DIT Cour d’appel de Paris Victoire du PAD, sentence jugée irrégulière
Janv. 2023 Cour de cassation rejette le pourvoi de DIT DIT, PAD Cour de cassation (France) Confirmation définitive de l’annulation
Nov. 2023 CCJA valide la création de la RTC PAD, DIT CCJA (OHADA, Abidjan) Légalité de la RTC confirmée, PAD renforcé
2023 Autonomisation complète de la RTC PAD, RTC RTC devient entité autonome, performances saluées
2024 Fin théorique de la régie RTC (prolongée) PAD, RTC Aucune relance de concession à TIL prévue

Acteurs clés

PAD : Port Autonome de Douala, autorité portuaire et initiateur de la régie RTC.

DIT : Douala International Terminal, ancien concessionnaire (APMT/Bolloré).

TIL : Terminal Investment Limited, filiale de MSC, vainqueur de l’appel d’offres annulé.

RTC : Régie du Terminal à Conteneurs, entité publique créée par le PAD.

Tribunal administratif du Littoral : Juridiction camerounaise ayant suspendu la RTC.

Cour suprême du Cameroun : A confirmé l’annulation de l’appel d’offres.

CCI Paris : Tribunal arbitral ayant initialement condamné le PAD.

Cour d’appel et Cour de cassation de Paris : Ont annulé la sentence arbitrale.

CCJA (OHADA) : Juridiction communautaire ayant validé la RTC.


Documentation