Autoroute Yaoundé Douala

L’autoroute Yaoundé-Douala, projet phare censé relier les deux principales villes du Cameroun, est devenue un exemple frappant des problèmes structurels du pays en matière d'infrastructures et de gestion des projets publics. Initiée il y a plus de dix ans, cette autoroute de près de 200 km a pour but de faciliter le transport, d’améliorer les échanges économiques entre Yaoundé et Douala, et de réduire les accidents sur l’ancienne route nationale surchargée.

Voici quelques points essentiels pour comprendre l'état et les controverses autour de ce projet :

1. Retards et dépassements de budget

  • Initialement prévue pour être achevée en quelques années, l’autoroute n'a toujours pas été finalisée. Les phases de travaux se sont enchaînées, avec des interruptions fréquentes dues à des problèmes de financement, des querelles administratives, et des problèmes techniques. Le budget initial a considérablement augmenté au fil du temps, sans que les travaux ne progressent réellement à la hauteur des attentes.

2. Problèmes de conception et d’exécution

  • Le projet a souffert de modifications en cours de route, notamment pour intégrer de nouvelles zones de desserte ou des changements d'itinéraire. Ces changements ont ralenti la progression des travaux et ont montré un manque de planification à long terme. Des défauts dans les matériaux et des erreurs de conception ont également été rapportés, impactant la qualité et la durabilité de l’ouvrage.

3. Conséquences économiques et sociales

  • Cette autoroute, censée dynamiser les échanges et le développement économique, reste en grande partie inutilisable. Les retards ont prolongé la dépendance à l’ancienne route nationale, congestionnée et dangereuse, ce qui a coûté des vies et alourdi les coûts pour les usagers. Les retombées économiques espérées, comme l’essor de nouvelles zones commerciales et industrielles le long du corridor, ne se sont pas matérialisées.

4. Critiques de la gestion et soupçons de corruption

  • Des accusations de corruption, de mauvaise gestion, et d'inefficacité pèsent sur le projet. Les fonds publics mobilisés sont souvent questionnés, et le manque de transparence dans l'attribution des marchés publics, les contrôles et les audits a été dénoncé à plusieurs reprises.

5. Symbolique de la gouvernance camerounaise

  • Plus qu'un simple projet d’infrastructure, l'autoroute Yaoundé-Douala est devenue un symbole des dysfonctionnements du système camerounais. Elle illustre l'arbitraire, le manque de responsabilité et de redevabilité des acteurs publics envers les citoyens, ainsi que la persistance de la corruption dans les projets publics.

En somme, l'autoroute Yaoundé-Douala reste un projet inachevé malgré les investissements massifs, et elle est aujourd’hui perçue par la population comme un échec et une illustration du besoin de réformes dans la gestion publique au Cameroun.

Dans la presse

2024 : La phase 2 de l’autoroute Yaoundé-Douala (141,1 km) va coûter 880 milliards FCFA

2024 : Autoroute Yaoundé-Douala : les 136 km de la 2e phase estimés à 812,8 milliards de FCFA

2024 : Paul Atanga Nji interdit la circulation des véhicules lourds sur l’autoroute Yaoundé-Douala

 

Mar 28, 2024 Raccordements de la phase 1 de l’autoroute Yaoundé-Douala au réseau existant : les travaux sur les deux sections raccordant la première phase de l’autoroute, côté Yaoundé via Nkolbisson (11.14 Km) et côté Nationale 3 à travers Boumnyebel sur un linéaire de 13.50 Km sont quasiment achevés, et l’entreprise s’active à exécuter les travaux connexes du projet.

 

2021 : Autoroute Yaoundé-Douala : les 60 premiers kilomètres ouverts à la circulation ; Le directeur général des Travaux d’infrastructures du ministère des Travaux publics (Mintp) a procédé le 31 décembre à la réception « technique » des 60 premiers km de l’autoroute Yaoundé-Douala. Ce qui signifie que l’infrastructure est désormais ouverte à la circulation.  « C’est une étape qui consiste à apprécier la qualité technique de l’infrastructure, la conformité avec le cahier des charges et qui permet de se prononcer sur la réception des travaux. La réception étant validée, l’infrastructure est dès à présent ouverte à la circulation avec une période de garantie d’un an. La période de garantie permet également de corriger des vices de construction qui pourraient être observés dans la réalisation des travaux. La réception définitive va donc être prononcée au terme de la période de garantie », apprend-on.

 

2019 : Indemnisations à Lobo: le maire et l’ancien sous-préfet à Kondengui - L’affaire des indemnisations des populations riveraines de l’autoroute Yaoundé-Douala dans la localité de Lobo, commune du département de la Lékié a connu un nouveau rebondissement vendredi dernier avec la mise sous mandat de détention provisoire à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé, d’un certain nombre de personnalités.

Il s’agit notamment de celui qui, à l’époque des faits, était sous-préfet de cet arrondissement, Abdou Kaïgama, depuis lors affecté aux mêmes fonctions à Akom II dans le département de l’Océan, du maire de la commune, François Bindzi Ebodé et d’une dizaine d’autres personnalités, dont des chefs de cantons et de villages. Une interpellation qui intervient à la suite d’une procédure initiée par le Tribunal criminel spécial (TCS) pour des faits remontant en 2014.

L’on se rappelle que la publication de la liste des personnes à indemniser n’avait pas manqué de soulever des remous au sein de l’opinion, et particulièrement des populations locales qui n’avaient pas manqué de manifester leur contentement par des sit-in ayant eu pour conséquence, le ralentissement des travaux de construction de cette importante infrastructure routière. Certains bénéficiaires estimaient modiques, les sommes qui leur étaient allouées, tandis que des personnes inconnues dans la localité bénéficient de fortes rétributions dans le cadre de ce projet.

 

2017 : Autoroute Yaoundé-Douala : Près de 10 km déjà bitumés 

Les travaux de la phase I, longue de 60 km, courent actuellement jusqu’au Pk 40. Ce, au grand bonheur du MINMAP qui a effectué une visite de chantier hier. L’épaisseur de la chaussée est impressionnante : 50 cm, étalé de manière continue sur sept kilomètres. Au milieu de cette gigantesque chaussée de deux fois deux voies,    extensible  à  deux  fois trois voies, des arbustes et autres plantes poussent  harmonieusement.  Du  Pk 7 au Pk 10, le bitume est également en train d’être posé, en même temps que  se  font  des  remblais  et  se construisent  des  ouvrages  hydrauliques.  

 

2016 : Autoroute Yaoundé-Douala (Phase I). On indemnise les riverains entre le PK10 et le PK 20 - Le payement de ces indemnisations est l’aboutissement de l’accélération de nombreuses procédures qui avaient pour but de prendre en compte les riverains dont les noms n’apparaissaient pas dans le décret  N°2015/1318/PM du 15 juin 2015, portant indemnisation des personnes victimes de destruction de biens dans le cadre du projet de construction de l’autoroute Yaoundé-Douala, entre le Pk 10 et le Pk 20 dans l’arrondissement de Lobo, département de la Lékié, région du Centre.

 

 


Au commencement : Les étapes de la construction de l’autoroute Yaoundé-Douala

5 juillet 2012, 

Après la signature d’une convention de prêt, la semaine dernière, pour financer les premiers travaux de l’autoroute entre Yaoundé et Douala, C.T. a recueilli des explications du ministre des Travaux publics, chargé de l’emploi des 241,4 milliards obtenus par le Cameroun du bailleur de fonds qu’est Eximbank of China. 

 

 

Patrice Amba Salla décrit ici les étapes immédiates de ce grand projet qui permettront de bitumer 215 km de route entre les deux principales villes de notre pays.

 

Quel est le calendrier de la construction de l’autoroute Yaoundé-Douala ?

La convention qui a été signée avec la China First Highway Engeneering Corporation est censée nous permettre de faire trois choses : la recherche de financement, étudier et concevoir une autoroute et exécuter les travaux ainsi conçus. Aujourd’hui, nous sommes à la fin de la première phase, on a trouvé les financements [Convention signée jeudi 28 juin dernier entre le ministère en charge de l’économie et Eximbank of China, pour un montant de 241,4 milliards de F]. La deuxième servira à effectuer les études d’exécution pour la première section qui sont censés durer un an. Les travaux vont être exécutés, cela coule de source, en fonction des études. Le seul bémol à ce programme est que, comme les travaux concernent la première section alors que les études concernent toute l’autoroute, il est possible que nous n’attendions pas douze mois pour démarrer les travaux. On peut valablement penser que lorsque les travaux d’études de la première section sont terminés, on peut lancer des travaux de terrain. Cela peut se faire dans les six à sept mois suivants. Si l’on fait des projections, on peut dire que vers la fin de l’année, il est possible de mettre l’entreprise sur le terrain.

Quelles en seront les caractéristiques ?

L’autoroute en question sera une grosse emprise de près de 150 mètres. Nous aurons deux fois deux voies de quatre mètres chacune. Il y aura une bande d’arrêt de trois mètres de chaque côté, un terre-plein central de trois mètres, un accotement d’un mètre de part et d’autre. Le droit a également consacré en matière d’infrastructures routières une emprise de la route qui est de quelque 25 mètres à partir de la sortie de la route. L’autoroute, je dois le préciser, est un couloir fermé, où l’on entre et sort à des endroits précis. Elle n’est pas une route qui permette que l’on vienne vendre des bananes au bord. On n’y fait pas de demi-tours, parce qu’il y a un terre-plein central haut d’environ un mètre. On emprunte une voie que l’on suit jusqu’à l’arrivée. Il n’y a pas possibilité de faire marche arrière. Ses deux couloirs de circulation servent deux files de voiture de chaque côté. Il est possible, si nous en avons les moyens de faire trois voies de chaque côté. Tout dépend de nous, mais pour le moment, on a décidé d’en faire deux.

 

Certains s’alarment sur le tracé…

 

Il n’y a pas à s’alarmer face à un tel projet. Surtout quand on sait que l’indemnisation est préalable à tous travaux. Quoi qu’il en soit, nous avons proposé un tracé et l’autoroute ne sera pas la duplication d’une route nationale. C’est tout un autre réseau qui doit éviter les agglomérations parce que le coût des indemnisations risquerait alors de dépasser celui des travaux. Comme nous avons un pays avec des zones vierges, il est indiqué de faire passer les autoroutes sur ces endroits où l’impact socio-environnemental est allégé.

 

Vous vous souvenez que la question de l’encadrement juridique des autoroutes s’est posée. Quid de cette préoccupation et de la gestion environnementale et sociale de ce projet en cours de réalisation ?

 

Toutes ces questions sont envisagées. C’est pour cela que les études programment l’emprise de la route. On voit dans cette emprise qu’il y aura des personnes installées, que l’on fera une déclaration d’utilité publique, qu’il y aura des indemnisations et des déguerpissements. Il y a un temps nécessaire pour que tout cela soit fait. Ce n’est pas, en effet, le fait de donner de l’argent à une personne qui fait qu’elle soit déguerpie. Il faut le lui donner dans une marge qui lui permette de se réinstaller ailleurs avant de détruire. Il peut aussi arriver que l’on trouve sur le tracé les réseaux de transport d’électricité ou d’eau qu’il faut déplacer. Tout cela se fait après des études. Si on avait eu la maîtrise du financement, on aurait pu les faire bien avant, mais on peut aujourd’hui.

 

Propos recueillis par Jean Baptiste KETCHATENG